Bandits (1997) – Vivre libre ou mourir
Comédie musicale, œuvre subversive, road movie… Bandits a tout du film culte générationnel fortement influencé par ses modèles américains, même si le périple proposé se révèle vite limité par les étroites routes allemandes et un scénario, somme toute, plutôt sommaire :
« Quatre femmes s’évadent de prison, traversent l’Allemagne en voiture, font de la musique et deviennent des stars. Punkt. » Point barre.
Ouvrez la cage
Alors qu’une détenue regarde par la fenêtre de sa prison pour voir la cour exiguë en contrebas, les premières paroles de la chanson de Bob Dylan All Along the Watchtower résonnent : There must be some way out of here. La chanson date de 1967. Elle sera sublimement reprise par Jimmy Hendrix l’année suivante.
Bandits prolonge l’esprit de mai 68, saupoudré d’une bonne dose de féminisme, sans jamais cacher son inspiration qu’il puise clairement auprès de Thelma et Louise (1991). La référence est tellement évidente qu’une caricature de Brad Pitt rejoint le groupe pour quelques minutes. Mais cette fois-ci, les filles dégageront elles-mêmes le petit minet. Manu militari.
Tout au long de l’histoire, nos quatre héroïnes s’opposent frontalement à un monde entièrement tenu par des hommes. Du flic zélé, au journaliste qui les dénonce, en passant par les matons ou les producteurs de musique.
Les filles tirent malgré tout leur épingle du jeu. Leur secret : miser sur la solidarité féminine et ne rien lâcher. Une posture dangereusement contagieuse que l’appareil répressif de l’Etat se doit de réprimer avant que le reste de la population ne renoue également avec ses rêves de liberté.
Le film tente de faire partager ce désir d’émancipation à travers les nombreuses chansons pop et rock qui cadencent l’histoire. Inconsciemment, les airs s’insinuent en nous, au point que l’on finit par les fredonner sans s’en rendre compte. Reste à savoir si l’envie de liberté et d’insoumission peut aussi facilement se propager.
Quelle société pour les agités
Quelle que soit la réponse, l’identification avec nos quatre attachantes fugueuses est totale. Aussi stéréotypées soient-elles, jamais leurs personnalités ne s’effacent et leurs différences font leur force. Jasmin Tabatabai s’impose néanmoins en leader du groupe. Très impliquée dans le film, c’est d’ailleurs elle qui compose plusieurs titres de la bande son. Son personnage, indomptable et impulsif, n’en fait qu’à sa tête. Dangereuse, elle incarne la contestation et la subversion avec une bonne dose de volonté révolutionnaire. Mais au-delà, elle questionne sur la place que peut bien laisser la société à des individus qui ne rentrent pas dans les moules prévus.
Le sérieux de l’entreprise est évident. Souvent filmé comme un vidéo clip avec des mouvements de caméra soignés, des flous ou encore des coupes rapides, Bandit se montre également soucieux de livrer des images léchées. Le résultat est fidèle aux intentions. Que ce soit dans la campagne ensoleillée du nord de l’Allemagne ou au plus profond de la forêt de béton des villes, le film s’avère un constant régal pour les yeux.
Courageux, Bandits se termine même en cohérence avec la mélancolie ambiante du métrage. Sans grands émois ou dramatisation déplacés, le final révèle de manière logique ce qui attend nos délinquantes juvéniles. Une fin douce amère, mais logique pour une oeuvre qui, sous l’apparat d’un film grand public, ne fait pas de concession.
Allemagne - 1997 - Katja von Garnier
Interprètes : Katja Riemann, Jasmin Tabatabai, Nicolette Krebitz, Jutta Hoffmann, Hannes Jaenicke, Werner Schreyer, Andrea Sawatzki, Oliver Hasenfratz...