Berlin Syndrome, Melanie Joosten créé un nouveau phénomène psychologique
Wolf Creek mettait en garde les touristes désirant explorer les immensités australiennes. Berlin Syndrome, quant à lui, démontre que la capitale allemande et sa jungle urbaine sont tout aussi dangereux…
Berlin Syndrome est l’adaptation du roman éponyme de Melanie Joosten. L’auteur d’origine australienne a mis à profit les années durant lesquelles elle a vécu à Berlin pour imaginer l’histoire d’une compatriote routarde, Clare, séquestré par Andi, un professeur d’anglais, dans un appartement d’un quartier désaffecté de Berlin.
Le titre du roman faire évidemment référence au syndrome de Stockholm. Il s’agit d’un phénomène psychologique observé chez des otages ayant vécu durant une période prolongée avec leurs geôliers. Au bout d’un certain temps, selon des mécanismes complexes d’identification et de survie, ceux-ci développent une sorte d’empathie pour ceux qui les séquestre.
Dans le roman, la captivité de Clare est une métaphore de la RDA exprimée à travers les points de vue de Clare et d’Andi lors de longs monologues intérieurs. Ainsi, on découvre qu’Andi éprouve des remords mais cède aussi à la pulsion de vouloir toujours tout contrôler. Clare, de son côté, est écartelée entre sa soif d’évasion et son besoin d’amour et de sécurité assuré par Andi. Grâce aux personnages nuancés, le roman permet une analyse juste des fantasmes de chacun. Malheureusement, le film de Cate Shortland, quant à lui, échoue à vouloir retranscrire cette allégorie à l’écran.
Le thématique qui s’intéresse à analyser les relations entre les dictatures et leurs citoyens passe ici au second plan. Elle laisse la place aux sentiments plus individualistes des deux personnages principaux. Ainsi, Andi n’est qu’un malade mental cherchant simplement à s’assurer la présence d’une femme à domicile. Le parallèle avec la RDA qui devait tout mettre en œuvre pour éviter que ses habitants ne quittent le pays est inexistant. Le film se transforme alors en un simple thriller psychologique grand public, à l’image de ceux que produit le cinéma américain. Le sentiment est renforcé lorsqu’Andi décide de se trouver une nouvelle captive. Celle-ci est une très jeune fille, faisant passer Andi pour un psychopathe plus ou moins pédophile, de surcroît. On est loin de l’ambiguïté de son personnage et de l’allégorie proposée par le livre.
Il en est de même pour le personnage de Clare. À l’évidence, la sécurité et l’insouciance qu’offrent Andi ne semble jamais convaincre Clare… Il en résulte un film sans ambivalence.
L’enquête policière et son cortège de rebondissements ne laissent pas non plus planer de doute sur les intentions du réalisateur.
Dans ce domaine, Berlin Syndrome n’est cependant pas dénué de qualités… Le début du film où nous rencontrons les deux protagonistes principaux dans des décors surprenants (jardinets remplis de nains de jardins) est joliment mise en scène et capte immédiatement l’attention. Lorsque le film se transforme en huis-clos dans l’immeuble délabré où vit Andi, l’intérêt est constamment maintenu grâce à une montée du suspens en crescendo. Les interprétations réussies de Teresa Palmer (Clare) et de Max Riemelt (Andi) complètent le cahier des charges de ce thriller haletant et divertissant.
Berlin Syndrome
Australie – 2017
Réalisation : Cate Shortland
Interprètes : Teresa Palmer, Max Riemelt, Matthias Habich, Emma Bading, Elmira Bahrami, Christoph Franken, Lucie Aron…