Eolomea, un film de science-fiction nébuleux
Nul doute qu’Eolomea paraîtra particulièrement énigmatique au spectateur qui s’y risquera… Ce film de science-fiction qui s’intéresse plus au cosmos intérieur qu’aux étoiles est également psychédélique tout en étant bien plus introverti que la grande majorité des films du genre. Enfin, il ne raconte pas une seule histoire, mais trois, en même temps et sans respecter la chronologie de surcroit.
Le futur. Les hommes vivent et travaillent dans l’Espace. Certains y sont nés et n’ont encore jamais vu la Terre. C’est dans ce contexte que huit vaisseaux spatiaux disparaissent sans laisser de trace. Par ailleurs, les communications vers la station Margot sont interrompues. Maria Scholl, responsable de la station « Centre-Terre » organise une séance de crise. Durant la réunion, la scientifique défie le professeur Olo Tal qui s’oppose à l’interdiction de circuler pour les vaisseaux spatiaux… Il semble d’ailleurs en savoir plus que ce qu’il laisse à croire. C’est alors qu’on apprend qu’il était précédemment responsable du projet Eolomea dont la mission était d’entrer en contact avec une planète éloignée.
Bavard jusqu’à l’agacement, doté d’une histoire qui prend largement son temps avant de rentrer dans le vif du sujet, Eolomea est donc une œuvre difficile, exigeant patience de la part du spectateur.
Malgré tout, le film de Herrmann Zschoche dispose de certains attraits.
Naïf, simpliste, Eolomea est également fascinant. Par exemple, dès le générique nous sont offerts de magnifiques images de Jupiter. Et durant toute la durée du film, comme les effets-spéciaux, les décors ne sont pas en reste.
Les personnages sont tous élégants et ne posent que des questions critiques et intelligentes vis-à-vis des autorités, ce qui est surprenant dans un film produit par deux pays du bloc communiste. Il en résulte une œuvre presque occidentale dans le ton. Cox Habemma qui interprète la scientifique Maria participe d’ailleurs pour beaucoup à cette impression. Élégante, confiante, la néerlandaise insuffle une fraîcheur que l’on n’imaginait pas trouvé dans un film issu de la RDA.
Le message du film qui incite à se dresser contre les lois et les règles afin de conduire l’humanité vers une évolution préférable est également étonnant…
S’inscrivant dans la génération Flower-Power, le film est en effet une déclaration d’amour à la liberté. Ainsi, les personnages principaux qui passent la majeure partie de leur temps à occuper un cockpit ennuyeux et à taper sur de tristes claviers reliés à de mornes écrans, se désespèrent de pouvoir faire les choses simples qu’ils rêvent d’accomplir : À quoi bon conquérir l’espace lorsque le bonheur est à portée de main ? Dans ce contexte, la légèreté et la lenteur du film trouvent tout leur sens ; c’est donc par fidélité à son propos que le métrage de Herrmann Zschoche tourne le dos à l’action et à l’aventure.
Parfois proche du film de vacances avec ses scènes de plage, ce film de science-fiction tourné en 70 mm dispose malgré tout d’effets-spéciaux admirables. Bien sûr, la vision d’un futur ampli d’ordinateurs gigantesques et de robot métalliques n’est plus très réaliste aujourd’hui mais ne doit pas confiner le film à la Série Z… ni d’ailleurs au cinéma de genre dont il s’éloigne radicalement.
RDA, Bulgarie - 1972 - Herrmann Zschoche
Interprètes : Cox Habbema, Iwan Andonow, Rolf Hoppe, Wsewolod Sanajew, Petar Slabakow…