In the fade, se fondre dans la violence
La haine pure, un attentat, deux morts : un enfant, un compagnon. Katja perd tout. Sa vie s’arrête brutalement. Mais le monde continue de tourner. L’indifférence peut-elle inciter à se fondre soi-même dans la violence ? Telle est la question que pose in the Fade.
Katja arrive en voiture dans la petite rue où travaille au rez-de-chaussée son mari Nuri. Son entreprise propose des traductions pour ses clients turcs. Katja ne compte pas rester très longtemps ; elle vient simplement récupérer son fils qui est rentré de l’école. Là, une policière lui barre le chemin « Il y a eu une explosion, vous ne pouvez pas passer, continuez votre chemin »… Katja s’extirpe de la voiture, se baisse pour passer sous le bandeau de la police qui délimite la scène. Des policiers arrêtent sa progression, la plaque au sol. C‘est la consternation, un attentat vient de bouleverser la vie de la jeune femme.
Le nouveau film de Faith Akins raconte l’histoire de cette femme qui, à Hambourg, perd son époux et son fils de 8 ans dans un attentat commis par l’extrême droite. Le film fait ainsi référence au Parti national-socialiste souterrain (Nationalsozialistischer Untergrund en allemand), une association terroriste qui a commis dix meurtres sur des personnes d’orgines étrangères et une policière entre 1999 et 2006. Plus loin, in the Fade dénonce un racisme institutionnel dans lequel les victimes d’origines étrangères, victimes de préjugés, doivent d’abord démontrer leur innocence avant de pouvoir réclamer justice.
Le film est raconté en plusieurs chapitres : le prologue, l’attentat, les conséquences, l’arrestation des coupables, le procès, le verdict et, terrible, l’application de la peine et de la justice par Katja elle-même.
Ainsi, in the Fade n’est pas un film sur la misère sociale qui génère le racisme ou les milieux d’extrême droite en Allemagne. C’est un film sur la perte d’une partie de soi-même et la difficulté de se reconstruire dans une société qui a tellement accepté la violence qu’elle ne la voit, ne la condamne plus, et laisse les victimes seules, détruites. Le bénéfice du doute que l’on octroie aux coupables empiète ainsi sur le droit à la justice des victimes.
Tout en décrivant une société sombre, in the Fade est mis en scène à la manière d’un thriller efficace qui met la souffrance d’une mère au centre de son récit. Le film est merveilleusement porté par Diane Kruger qui joue ici pour la première fois dans la langue de Goethe. Grâce aux émotions qu’elle génère, elle donne corps au personnage de Katja et transforme le film en une expérience émotionnelle de sang, de sueurs et de larmes.
in the Fade –
Allemagne, France – 2017 –
Réalisation : Faith Akin –
Interprètes : Diane Kruger, Denis Moschitto, Numan Acar, Samia Muriel Chancrin, Johannes Krisch…