L’année du Chat, un thriller spectaculaire
La première réplique du film L’Année du Chat donne le ton : Dans deux heures, en bas (dans la rue), ce sera la guerre.
Rythmé, comportant de nombreux rebondissements, soigné et élégant, L’Année du Chat est un film majeur dans l’histoire du cinéma allemand qui, jusqu’alors (et même jusqu’à ce jour), est et reste pauvre en matière de films d’action.
De sa chambre au sixième étage d’un hôtel situé à Düsseldorf au milieu d’un complexe d’affaires moderne, le gangster Probek dispose d’une vue imprenable sur la rue, et plus particulièrement sur la banque, celle dans laquelle ses comparses se sont repliés avec des otages qu’ils ne libéreront qu’en échange d’une rançon de trois millions de Deutsch Mark. Bien placé, Probek renseigne ses complices sur les opérations menées à l’extérieur par la police qui dispose donc d’une longueur de retard. Et Probek dispose encore d’un atout supplémentaire… Sa maîtresse, Jutta Ehser est également l’épouse du directeur de la banque.
Avec sa prise d’otages, le siège établi par la police et son lot de rebondissements à la limite de l’absurdité, L’Année du Chat évoque évidemment Un Après-midi de Chien de Sidney Lumet (1975). Cependant, le film s’inscrit également dans la droite lignée de film Neo-Noir comme Body Heat (1981) de Lawrence Kasdan, No Way Out (1987) de Roger Donaldson ou encore Contre toute attente (1984) de Taylor Hackford, ainsi que le cinéma d’Alain Corneau, Jean-Pierre Melville ou Bertrand Tavernier.
Cependant, L’Année du Chat ne se contente pas de se nourrir de ses influences ; il apporte également sa pierre à l’édifice. Ainsi, à l’inverse de Sonny (Al Pacino dans le film de Sidney Lumet), Probek ne subit pas les événements. Du haut de son hôtel, il tire les ficelles. L’intelligence du scénario de Christoph Fromm et Uwe Erichsen, ainsi que la maîtrise de la mise scène de Dominik Graf, est de rendre la tension véritablement palpable lorsque la stratégie de Probek s’effondre. Lentement émerge le passé trouble qui lie Probek à son complice embusqué dans la banque. Puis c’est Jutta qui dévoile son jeu et s’impose alors comme femme-fatale.
La loyauté et la confiance, concepts nécessaires à la bonne marche de l’entreprise, s’effacent alors. Les trois principaux protagonistes pourtant totalement dépendant les uns des autres commencent alors à vouloir tirer leur épingle du jeu. La trahison remplace dès lors les beaux sentiments du début.
L’Année du Chat peut s’appuyer sur une interprétation impeccable, des personnages justement dessinés et au développement cohérent.
Seules peut-être les scènes d’action paraissent peu crédibles parfois.
Malgré le prix de la meilleure réalisation décerné par l’académie du cinéma allemand, ainsi qu’un succès public conséquent, L’Année du Chat ne fit pas école Outre-Rhin. Dominik Graf, son réalisateur (auteur en 2014 des Sœurs Bien-aimées), n’est pas tendre d’ailleurs avec le modèle de production du cinéma et de la télévision Allemande, incapable d’enfanter autre chose que des comédies et films d’auteurs ennuyeux. Durant sa carrière, Dominik Graf a dû s’adapté au système en faisant des compromis. Parfois, il a été capable d’éclairs de génie comme ce fut le cas avec cet Année du Chat.
À l’époque, Götz George âgé de 49 ans revient au cinéma qui l’avait boudé à la fin des années 60. Auparavant, il s’était imposé à la télévision dans la série Tatort où il incarnait Schimanski, un inspecteur aux méthodes rudes. Dans L’Année du Chat, il est tout aussi dynamique et rude mais passe de l’autre côté de la loi en incarnant le gangster Probek. Retrouvez-notre article dédié à cet acteur culte ici : https://thrillerallee.com/gotz-george-mythe-schimanski/
L’Année du Chat
Allemagne – 1988
Réalisation : Dominik Graf
Interprètes : : Götz George, Gudrun Landgrebe, Joachim Kemmer, Heinz Hoenig, Ralf Richter, Ulrich Gebauer, Sabine Kaack, Heinrich Schafmeister
Bande annonce en allemand :
Notre article consacré à Götz George :